Insuffisance surrénale : une grande fatigue liée à un déficit en cortisol
L'insuffisance surrénale correspond à un défaut de production d’une hormone vitale, le cortisol, ainsi que d’autres, par les glandes surrénaliennes. Souvent annoncée par une grande fatigue, un traitement à vie est nécessaire quelle qu’en soit la cause. La principale complication est l'insuffisance surrénalienne aiguë, une urgence vitale, qui peut survenir en cas de stress physique, y compris chez une personne traitée.
Des mots pour les maux
Le terme d'insuffisance surrénalienne regroupe un ensemble de maladies caractérisées par un défaut de production d'hormones par les glandes surrénales.
Les glandes surrénales sont de petites glandes accolées au-dessus des reins.
Le terme de « maladie d'Addison » peut aussi être employé pour les insuffisances surrénalienne primaires (périphériques) et en référence au Dr Thomas Addison qui a été le premier à en décrire les symptômes au 19ème siècle.
Qu'est que l'insuffisance surrénalienne ?
L'insuffisance surrénalienne est une maladie chronique qui résulte d'un défaut de production des hormones surrénaliennes par les glandes surrénales.
Les surrénales produisent plusieurs hormones, dont les principales sont le cortisol et l'aldostérone, mais aussi les androgènes surrénaliens.
L’insuffisance surrénalienne, avec son déficit chronique de cortisol, peut être liée à une maladie des surrénales et on parle d’insuffisance surrénale « primaire ». Elle peut être liée à un défaut de fonctionnement de l’organe qui commande les surrénales, l’hypophyse, et on parle d’insuffisance surrénale de « cause centrale » ou « insuffisance corticotrope ».
Le cortisol est un glucocorticoïde, une hormone majeure qui joue un rôle dans le métabolisme des glucides, des protéines et des graisses. Elle aide aussi le corps à gérer le stress, stimule le tonus vasculaire et a une action anti-inflammatoire. Elle a une action importante sur le système immunitaire. Elle a aussi une action inhibitrice sur la sécrétion d’hormone antidiurétique et est stimulante sur le système nerveux central.
L'aldostérone est un minéralocorticoïde qui aide les reins à réguler la quantité de sel et de potassium dans le sang.
La sécrétion de cortisol par les glandes surrénales est contrôlée par l'ACTH, une hormone produite par l'hypophyse, une glande située sous le cerveau, qui est stimulée en cas de stress physique, car elle interagit avec la partie du cerveau qui contrôle le fonctionnement du corps, l’hypothalamus.
Quels sont les différents types d'insuffisance surrénalienne ?
Le défaut de production d'hormones surrénaliennes peut provenir d'un mauvais fonctionnement des glandes surrénales ou d’un mauvais fonctionnement de l'hypophyse qui produit normalement de l'ACTH, et dont le rôle est de stimuler la production de cortisol par les glandes surrénales.
Dans le premier cas, on parle « d'insuffisance surrénalienne périphérique » ou « primaire » ou « primitive ».
Dans le second cas, lorsque la maladie touche l'hypophyse, on parle « d'insuffisance surrénalienne centrale », « haute », « corticotrope » ou « secondaire ».
Quels sont les signes d'une insuffisance surrénalienne ?
En cas d'insuffisance surrénalienne, les symptômes sont variés et dépendent en partie de la cause de la maladie.
Le plus souvent, les patients atteints sont fatigués+++, avec un amaigrissement et une perte d'appétit, ainsi qu'une tension artérielle basse, des nausées, des douleurs du ventre.
Si l'insuffisance surrénalienne est périphérique (causée par une anomalie au niveau des glandes surrénales), les signes cliniques sont plus marqués, en particulier l’hypotension artérielle avec une perte de sel et une tendance à l’élévation du taux de potassium dans le sang (« hyperkaliémie »). La concentration d’ACTH d’origine hypophysaire, est élevée du fait de la perte du rétrocontrôle négatif, et c’est cette augmentation de l’ACTH qui est responsable d’une pigmentation de la peau, appelée « mélanodermie », dans 80 % des cas, en particulier au niveau des zones exposées au soleil.
Au contraire si l'insuffisance surrénalienne est d'origine centrale (atteinte de l’hypophyse ou de l’hypothalamus), la plus fréquente étant l’arrêt d’un traitement prolongé par les corticoïdes+++, la sécrétion d’aldostérone est préservée, ce qui explique des symptômes généralement moins sévères. La baisse de tension est plus rare en raison de l’absence de la perte en sel : simple hypotension transitoire lors du passage assis debout (« hypotension orthostatique »). Il peut exister une rétention de l’eau par augmentation de la sécrétion d’une autre hormone, l’ADH. L’ACTH est, en revanche, basse et on retrouve plutôt une grande pâleur de la peau.
Quelles sont les causes des insuffisances surrénaliennes périphériques ?
En cas d'insuffisance surrénalienne périphérique, l'origine la plus fréquente chez l’adulte (80 %) est auto-immune, c'est-à-dire qu’elle est secondaire à une maladie provoquant la sécrétion d'auto-anticorps, dirigés contre les glandes surrénales et entraînant son dysfonctionnement. On parle de « rétraction corticale » car les glandes s'atrophient quand on les regarde au scanner. Elle est souvent associée à d’autres maladies auto-immunes comme une thyroïdite de Hashimoto ou une polyendocrinopathie auto-immune de type 1 ou 2.
Les autres causes d'insuffisance surrénalienne périphérique sont : la tuberculose (en particulier chez le transplanté ou l’immunodéprimé avec antécédents de tuberculose), et, plus rarement, le VIH (à un stade avancé, avec la localisation surrénalienne d’une infection opportuniste ou une toxicité médicamenteuse) ou une tumeur (métastases surrénaliennes bilatérales d’un cancer du poumon, digestif, du rein ou du sein), ou un lymphome, ou une nécrose des surrénales (en cas de choc hypovolémique avec baisse brutale et intense de la pression artérielle ou de surdosage en traitement anticoagulant responsable d’une hémorragie des surrénales).
Chez l'enfant, l'origine est le plus souvent génétique, avec un défaut dans la chaine de fabrication de l’hormone, ce que les médecins appellent un bloc enzymatique d’origine héréditaire (le plus fréquent est le déficit en 21-hydroxylase), et la maladie la plus fréquente est donc « l'hyperplasie congénitale des surrénales » (hyper-développement des surrénales pour essayer de compenser le déficit de fabrication). La maladie auto-immune ne toucherait que 20 % des enfants.
Quelles sont les causes des insuffisances surrénaliennes centrales ?
En cas d'insuffisance surrénalienne centrale, la cause la plus fréquente est le traitement prolongé par corticoïdes, notamment s'il est pris à fortes doses. Cette décompensation peut en théorie survenir à partir de au moins 7 mg par jour de prednisone pendant 3 à 4 semaines, mais il existe une forte variabilité entre les personnes. Il existe même un risque de d’insuffisance surrénale aiguë en cas de maladie surajoutée qui surviendrait au cours de la corticothérapie prolongée à dose forte.
Les autres causes sont toutes les tumeurs de l'hypophyse (par exemple adénome à prolactine), des maladies auto-immunes, une sarcoïdose, ou des séquelles de traumatisme, de chirurgie ou de radiothérapie de l’hypophyse. Dans ces situations, le déficit corticotrope est rarement isolé et s’associe à d’autres déficits en hormones hypophysaires, voire à des signes neurologiques.
Chez la femme, une nécrose brutale peut survenir très rarement à l'occasion d'un choc hypovolémique lors d’un accouchement compliqué. C’est l’insuffisance corticotrope du post-partum ou syndrome de Sheehan.
Quelles sont les complications de l'insuffisance surrénalienne ?
L'insuffisance surrénalienne chronique, quelle que soit sa cause, peut se compliquer d’une insuffisance surrénalienne aiguë, c'est-à-dire en un défaut brutal d'hormones surrénaliennes dans le sang. Il s'agit d'une urgence vitale.
Elle survient en cas d'arrêt du traitement substitutif, mais aussi de maladie aiguë comme une infection, ou lors d'une chirurgie ou en cas de traumatisme, qui augmentent brutalement les besoins en cortisol et déséquilibrent une situation fragile.
Les signes révélateurs peuvent être des vomissements et diarrhée avec douleurs digestives importantes (2 vomissements ou 2 épisodes de diarrhée en une demi-journée), des douleurs musculaires, de la fièvre, une déshydratation, un malaise mais aussi des crises d'épilepsie ou un coma.
Comment diagnostiquer une insuffisance surrénalienne ?
En cas de symptômes et d'examen clinique évocateurs, une prise de sang est réalisée pour établir le diagnostic.
Le dosage le plus indispensable est celui du taux de cortisol dans le sang (mesuré à 8 heures), la cortisolémie à 8h. Si le taux est très faible (inférieur à 5 microgrammes par décilitre ou 138 nanomoles par litre), cela signe le diagnostic. Si le taux est supérieur à 18 microgrammes par décilitre (ou 500 nanomoles par litre), cela élimine le diagnostic d’insuffisance surrénale.
L'ACTH, hormone sécrétée par l'hypophyse est, elle aussi, dosée. Cela permet de distinguer le type d'insuffisance surrénalienne : si l’ACTH est élevé avec un cortisol bas, cela signe une insuffisance surrénale primaire ou périphérique. Si l’ACTH est normale ou basse, avec une cortisolémie basse, cela signe une insuffisance surrénale corticotrope ou haute.
L'aldostérone, autre hormone sécrétée par les glandes surrénales sera aussi dosée.
Enfin si le dosage de la cortisolémie est intermédiaire (entre 5 et 18 microgrammes par décilitre), ce qui ne permet pas de trancher, un test au Synacthène® peut être prescrit. Ce produit est injecté par voie intramusculaire ou veineuse et mime le rôle de l'ACTH en stimulant les glandes surrénales pour produire du cortisol. Un dosage du cortisol est ensuite effectué 1 heure plus tard pour évaluer la réponse des glandes à la stimulation, réponse qui est normale en cas d’insuffisance surrénalienne centrale (plus de 18 microgrammes par décilitre) et réponse qui ne bouge pas ou reste basse en cas d’insuffisance surrénalienne périphérique (inférieur à 18 microgrammes par décilitre). Ce test au Synacthène® est également conseillé lorsque les médecins interrompent, même progressivement, une corticothérapie prolongée qui a pu être à forte dose.
Quand est-il nécessaire de faire un bilan pour trouver la cause d’une insuffisance surrénalienne ?
Une fois le diagnostic d'insuffisance surrénalienne posée, des examens sont nécessaires pour en retrouver la cause précise.
Selon les résultats des tests précédents, l'examen clinique et les antécédents, différentes explorations sont proposées : recherche d'anticorps si suspicion d'une maladie auto-immune (qui concerne 80 % des cas chez l’adulte en France) et qui est souvent associée à d’autres maladies auto-immunes comme une thyroïdite de Hashimoto ou une polyendocrinopathie auto-immune de type 1 ou 2, scanner des surrénales pour analyser leur aspect (surrénales atrophiques dans la maladie auto-immune ou calcifications surrénaliennes dans la tuberculose), scanner du thorax à la recherche de signes de tuberculose (10 % des cas d’insuffisance rénale primitive en Europe et surtout chez les personnes transplantées ou immunodéprimées), IRM du cerveau à la recherche d'une lésion de l'hypophyse, dosages de la 21-hydroxylase chez l’enfant et recherche d’un autre bloc enzymatique héréditaire, empêchant la sécrétion correcte du cortisol et de l’aldostérone...
Quels sont les principes du traitement en cas d'insuffisance surrénalienne ?
En cas d'insuffisance surrénalienne, un traitement substitutif par hydrocortisone, et éventuellement d’autres hormones, doit être instauré très rapidement et devra être rigoureusement pris à vie.
Le plus urgent est d'instaurer un traitement substitutif c'est-à-dire remplaçant les hormones qui ne sont pas produites par les glandes surrénales : l'hydrocortisone pour remplacer le cortisol (15 à 25 milligrammes par jour en 2 à 3 prises par jour), et le fludrocortisone, en plus, pour compenser le déficit en aldostérone si l'insuffisance surrénalienne est périphérique (50 à 150 microgrammes par jour en une prise).
Ensuite, si cela est possible, il faut traiter la cause de la maladie.
Une surveillance à vie sera nécessaire dans tous les cas.
Quelles sont les mesures associées au traitement médicamenteux d'une insuffisance surrénalienne ?
Lors de la mise en place du traitement, le médecin spécialiste donne des consignes très importantes au patient (« éducation thérapeutique ») pour limiter les risques de décompensation de la maladie (insuffisance surrénalienne aiguë), à l’occasion d’un stress physique, et dont les conséquences peuvent être tragiques :
- En plus du traitement, il faut limiter ses apports en sel.
- En cas de fièvre, troubles digestifs ou autres maladies générant un stress pour l'organisme, la dose d'hydrocortisone doit être doublée.
- La personne malade ne doit pas prendre d'autres traitements sans avis médical, notamment les laxatifs et médicaments diurétiques.
- Il est nécessaire d'avoir toujours avec soi une carte de traitement pour insuffisance surrénale, ainsi qu'une ampoule d'hydrocortisone injectable utilisable en cas de vomissements, malaise ou autres signes de décompensation.
- Enfin, tout nouveau médecin consulté doit être informé de l’insuffisance surrénale afin d'adapter la prise en charge.
Quels sont les risques en cas d'arrêt du traitement ?
Un patient atteint d'insuffisance surrénale ne doit jamais arrêter son traitement. En cas d'arrêt, sans avis médical, il existe un risque vital.
Le déficit brutal en cortisol et aldostérone provoque une insuffisance surrénalienne aiguë avec pour conséquence des troubles digestifs (diarrhées et vomissements), une déshydratation majeure, des douleurs musculaires, de la fièvre et des convulsions, voire un coma.
Une grossesse est-elle possible en cas d'insuffisance surrénalienne ?
Une grossesse est tout à fait possible en cas d'insuffisance surrénalienne. Un suivi plus rapproché sera cependant nécessaire pour adapter les doses d'hydrocortisone.
Une hospitalisation peut être nécessaire en cas de vomissements importants en début de grossesse, justifiant un traitement par voie intraveineuse.
Les doses seront aussi augmentées en cas de grande fatigue ou lors de l'accouchement.
Le traitement ne comporte pas de risque pour le bébé.
Comment réduire les risques de décompensation de la maladie ?
L'insuffisance surrénalienne chronique peut se compliquer d'une insuffisance surrénalienne aiguë, on parle de décompensation de la maladie. Les hormones se retrouvent à un taux trop bas dans le sang de manière rapide et les conséquences peuvent être tragiques jusqu'au décès.
Pour l'éviter, la première des consignes est de ne jamais interrompre son traitement par hydrocortisone. Celui-ci doit aussi pouvoir être adapté rapidement en cas d'épisode stressant pour l'organisme comme de la fièvre ou des troubles digestifs en lien avec les consignes données par le médecin spécialiste.
Il faut également adopter un régime alimentaire avec un apport limité de sel et ne pas prendre de traitement sans avis médical notamment les traitements laxatifs ou diurétiques.
En cas de symptômes évocateurs d'une insuffisance surrénalienne aiguë (malaise, plus de 2 vomissements et 2 diarrhées en moins d’une demi-journée, douleurs musculaires, fièvre...), une injection de 100 milligrammes d'hydrocortisone par voie intramusculaire doit être réalisée au plus vite.
La personne doit aussi constamment avoir sur elle sa carte de soins indiquant sa maladie et son traitement, afin d'en donner connaissance à tout médecin la prenant en charge, en urgence ou non.
La maladie en France chiffres
L'insuffisance surrénalienne est une pathologie rare qui touche un habitant sur 10 000 en France. Il existe plus de 20 maladies différentes pouvant être la cause de cette pathologie.
Liens vers des sites intéressants :
Le site du groupe de malades en faveur de la recherche sur les maladies chroniques, le groupe ComPaRe, permet aux malades de participer activement à la recherche, via des questionnaires en ligne, et de bénéficier en priorité des avancées de la recherche.
Ce groupe est organisé par l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris.
Association des médecins endocrinologues du Québec, l'insuffisance surrénalienne
Association surrénales, l'insuffisance surrénalienne aiguë
Association surrénales, insuffisances surrénales secondaires
Association surrénales, la maladie d'Addison
Hôpital d'Ottawa, fiche information patient sur l'insuffisance surrénalienne
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