Dépression de l’enfant et l’adolescent : la psychothérapie en 1er choix
La dépression de l’enfant et l’adolescent est une maladie sous-estimée du fait de la différence de présentation par rapport à l’adulte. En revanche, on voit souvent des épisodes dépressifs chez les adolescents qui sont des plaintes, mais pas des maladies dépressives proprement dites. La catastrophe serait de médicaliser ces plaintes et encore plus de déclencher la prise d’antidépresseurs.
Des mots pour les maux
La dépression classique, « unipolaire », est appelée « dépression nerveuse » dans le langage courant et « épisode dépressif majeur » dans le langage médical.
En dehors de la tristesse, un des signes cardinaux de la dépression est une perte de plaisir et d’envie de faire, que les psychiatres appellent « anhédonie ».
Le « trouble bipolaire » (ex « Psychose maniaco-dépressive ») est un autre trouble de l’humeur, qui se caractérise par une alternance d’épisodes dépressifs et d’épisodes maniaques.
Qu'est-ce que la dépression ?
La dépression (ou « trouble dépressif » ou « épisode dépressif majeur ») est une maladie neurologique du cerveau qui est très fréquente quelle que soit la civilisation et quelles que soient les époques.
L’adolescence est un moment où le corps change, où les addictions peuvent survenir… La vie émotionnelle de l’adolescent peut connaître des hauts et des bas, avec des passages à vide qui risquent de durer, et peuvent être assortis de grande tristesse et de repli sur soi. Il faut être vigilant et ne pas confondre déprime traversée durant l’adolescence et dépression. La dépression ne désigne pas un simple coup de déprime ou une tristesse passagère mais une véritable maladie neurologique, au moins dans ses formes les plus sévères, avec des troubles du fonctionnement de certains circuits neuronaux du cerveau.
Le principal signe est « l’humeur dépressive » qui entraîne une tristesse quasi-permanente et une vision pessimiste du monde et de soi-même, avec des idées de dévalorisation, voire parfois de désespoir. Ce trouble de l’humeur s’associe à un ralentissement psychomoteur qui se manifeste par des troubles des fonctions intellectuelles (« fonctions cognitives ») comme un déficit de la mémoire et des perturbations de la concentration et de l’attention.
Il existe une perte de plaisir et une perte d’envie de faire les activités de la vie quotidienne, même celles habituellement plaisantes, que les psychiatres appellent « l’anhédonie ». Ces signes peuvent s’associer à des perturbations du sommeil, une anxiété, une perte de l’appétit, un amaigrissement et une fatigue surtout le matin. Le malade souffre énormément et le principal risque de cette souffrance est le suicide.
La dépression chez les adolescents se complique parfois de manière dramatique par une fugue ou une tentative de suicide.
Pourquoi fait-on une dépression ?
Face à une dépression, on recherche souvent des explications et des causes, en particulier dans la vie récente. Il est alors fréquent d’avoir recours à des explications « de bon sens » comme une fatigue ou stress à l’école, ou une expérience affective douloureuse, comme un divorce des parents ou un deuil : « C’est parce que ça ne va pas à l’école », « C’est à cause des problèmes dans ma famille »... Des événements pénibles de la vie sont effectivement associés à un risque accru de dépression, tout comme les traumatismes affectifs ou sexuels de l’enfance, mais toutes les personnes exposées à ce type d’événements ne développent pourtant pas la maladie. De plus, beaucoup de personnes font une dépression sans motif apparent.
Il existe donc une autre raison, et en particulier une susceptibilité individuelle à la dépression qui est en partie d’origine génétique. Il est, en effet, largement rapporté une susceptibilité familiale : un enfant dont l’un des parents a fait une dépression a 2 à 4 fois plus de risque d’être lui-même dépressif au cours de sa vie. Certaines variations génétiques associées à cette vulnérabilité ont même été identifiées : au niveau des gènes codant pour le transporteur de la sérotonine (un neurotransmetteur essentiel au cours de la dépression) ou pour un facteur important de la prolifération, de la différenciation et de la survie des neurones (le BDNF pour Brain-Derived Neurotrophic Factor).
Cependant, les anomalies génétiques ne peuvent pas non plus expliquer à elles seules la survenue d’une dépression : l’expression de ces variations génétiques dépend donc de l’environnement et on parle « d’interactions gène-environnement » ou « d’épigénétique ». La vulnérabilité à une dépression et à des idées suicidaires après des stress de l’enfance (menaces, abandon, violences, abus sexuels) n’apparaîtrait que chez les personnes qui possèdent une anomalie génétique, comme par exemple, un raccourcissement du gène qui code pour le transporteur à la sérotonine.
Quant aux facteurs qui surviennent juste avant la dépression, en provoquant un stress excessif, comme un deuil, ils seraient plus des événements déclencheurs ou précipitants : on parle alors de « facteurs précipitants ».
Quelles sont les relations entre dépression et suicide ?
Les idées de suicide sont fréquentes dans la dépression. Le risque suicidaire dans cette maladie ne doit pas être négligé : le suicide est la seconde cause de mortalité chez les 15 à 24 ans. Cependant, une grande majorité des enfants et des adolescents enproie à des idées de suicide ne font pas de tentative de suicide.
Le lien entre dépression et suicide pourrait être d’origine génétique : de plus en plus de chercheurs considèrent le suicide comme une maladie psychiatrique à part entière, associée mais indépendante des autres maladies psychiatriques. Des anomalies génétiques seraient à l’origine, non seulement d’un risque augmenté de suicide, mais aussi d’un risque d’autres maladies psychiatriques, comme la dépression, le trouble bipolaire ou la schizophrénie.
En pratique, ce n’est pas forcément la dépression qui exposerait au risque de suicide, mais plutôt une vulnérabilité d’origine génétique que l’on retrouverait seulement chez certaines dépressions et dans certaines familles.
C'est le plus souvent quand une dépression n'est pas traitée et que le malade continue à souffrir qu'elle peut conduire au suicide, mais chez l’enfant et l’adolescent, le traitement antidépresseur peut conduire au suicide. Il est donc primordial de dépister les troubles dépressifs, de les soigner et de faire suivre régulièrement les personnes dépressives par un médecin. Les idées de suicide doivent aussi être abordées directement par les proches ou les médecins.
Quelle est l’évolution de la dépression ?
Les épisodes de dépression peuvent se résoudre avec le temps dans 10 à 15 % des cas en quelques mois, qu'ils soient traités ou non. Un épisode dépressif dure généralement plusieurs mois, voire des années et il retentit de manière importante sur la vie quotidienne, familiale et scolaire. Un épisode dépressif peut récidiver ou se chroniciser et ainsi compromettre la vie quotidienne des malades.
La plupart des épisodes dépressifs dure moins de six mois. Mais, la majorité des enfants et des adolescents souffrant d'un premier épisode dépressif seront une nouvelle fois atteint par au moins un autre épisode de plus dans leur vie. Les récidives peuvent donc se succéder et les périodes d'amélioration de l'état entre les épisodes dépressifs (« périodes de rémission ») peuvent devenir de plus en plus courtes.
Lorsque la personne bénéficie d’un traitement et d'un suivi adapté, le risque de réapparition des signes de dépression, et la souffrance qui leur est liée, sont largement diminués. D'où l'intérêt d'une prise en charge précoce et efficace de la maladie.
Quand doit-on évoquer une dépression ?
Les parents doivent rester attentifs aux éventuels signes d’une dépression chez leur enfant.
Ces comportements apparaissent souvent d’une manière soudaine avec apparition de difficultés à l’école, qu’il ne rencontrait pas auparavant, sautes d’humeur fréquentes avec alternance de phases d’irritabilité où l’enfant se met facilement en colère, et phases de repli où il n’a plus goût à rien. L’enfant néglige les activités qui l’amusaient jusque-là, il est triste et affiche une forte tendance à l’auto-dévalorisation. Il mange beaucoup ou manque d’appétit. Il s’ennuie et regarde la télévision excessivement tard. Il a du mal à s’endormir, son sommeil est perturbé, il fait des cauchemars et il est fatigué et grognon pendant la journée. Il se plaint fréquemment de maux de tête ou de maux de ventre.
Pris isolément, ces signes ne signifient pas forcément qu'il y a une dépression. On voit souvent chez les adolescents des épisodes dépressifs qui sont des plaintes, mais pas des maladies proprement dites. La catastrophe serait de médicaliser ces plaintes et encore plus de les traiter avec des antidépresseurs. Pour évoquer le diagnostic de dépression avérée, il faut donc qu’il y ait plusieurs signes associés. Ces troubles associés peuvent être une diminution de la capacité de concentration, une fatigue intense qui n'est pas améliorée par le repos ou le sommeil, une altération du sommeil qui devient peu réparateur, avec des réveils précoces.
L’anxiété peut être une maladie autonome, mais peut aussi apparaître au cours d’une dépression.
Comment faire la différence entre déprime et dépression ?
Il arrive à tout le monde de se sentir triste ou « déprimé », d’avoir des « idées noires » ou le « blues ». Il peut même arriver que ce « coup de cafard » s’accompagne d’une anxiété et de difficultés pour dormir. Mais cela ne veut pas pour autant dire que l’on souffre de dépression.
Au fil des événements, en particulier les deuils, les moments de tristesse font partie de la vie de tous. La tristesse, le découragement voire même, un désespoir passager, représentent des expériences normales. Ces problèmes d’humeur ne doivent pas être confondus avec la dépression.
Pour pouvoir parler de maladie dépressive, il faut que ces perturbations de l’humeur soient bien caractérisées, qu’elles s’associent à d’autres signes comme un ralentissement psychomoteur ou un manque d’envie de faire des choses (« anhédonie »). Il faut aussi qu’elles soient présentes de façon quasi permanente sur une période d’au moins deux semaines et qu’elles entraînent une gêne importante dans la vie quotidienne : difficulté à se lever, à aller à l’école, à se concentrer pour travailler, à sortir faire ses courses…
Comment faire le diagnostic de la dépression ?
Il est très important de détecter précocement un premier épisode dépressif car une dépression traitée tardivement peut être plus difficile à traiter et elle peut entraîner des complications.
Le diagnostic de dépression chez l’adulte peut s’appuyer sur la classification des maladies psychiatriques, le DSM-5 : le diagnostic est posé devant l’association d’au moins cinq des signes suivants, dont l’humeur dépressive et la perte d'intérêt.
1. Humeur dépressive.
2. Diminution marquée de l'intérêt ou du plaisir.
3. Perte ou gain de poids ou de l'appétit.
4. Insomnie ou hypersomnie.
5. Agitation ou ralentissement psychomoteur.
6. Fatigue ou perte d'énergie.
7. Sentiment de dévalorisation ou de culpabilité.
8. Diminution de l'aptitude à penser ou à se concentrer ou indécision. 9. Pensées de mort et idées suicidaires récurrentes.
Le diagnostic d’épisode dépressif majeur est posé typiquement quand l’épisode dépressif dure suffisamment longtemps (plus de quinze jours) avec, durant cette période, un sentiment de tristesse, de désespoir et d’absence d’envie pour quoi que soit, chaque jour ou presque, et pendant la plus grande partie de la journée, surtout si cet état de souffrance est associé à d’autres signes qui ont des répercussions au niveau affectif, social, professionnel ou dans d’autres domaines importants de la vie.
Mais, chez l’enfant et l’adolescent, l’épisode dépressif peut être plus ou moins évidents et 5 signes doivent retenir l’attention :
1. Problèmes à l'école, avec de mauvais résultats qui apparaissent brusquement.
2. Menaces ou tentatives de fugue.
3. Comportement nouveau avec les autres enfants : retrait, crainte...
4. Une agressivité ou une irritabilité inédites dans le cadre des relations de famille.
5. Des conduites à risque, surtout chez les adolescents, avec consommation d'alcool ou de drogues.
Les petits enfants n'ont pas accès à la parole de la même manière que les grands, et ils ne peuvent pas non plus maîtriser leurs émotions. C’est évident pour les tout-petits, mais cela reste vrai jusqu'à l'adolescence
L’âge modifie-t-il le diagnostic ?
Chez le petit enfant, la dépression peut prendre des aspects particuliers comme des comportements de retrait, d'absence, ou au contraire d'irritabilité et d'agitation, avec des plaintes répétées concernant le corps (douleur à répétition...) (= plaintes somatiques).
La dépression de l’adolescent prend souvent une forme masquée et peut, si on ne la repère pas à temps, se révéler brutalement par une tentative de suicide. La dépression peut aussi apparaître sous forme d’une irritabilité, d’une agitation, d’une agressivité, de violence verbale ou d’une indifférence apparente, mais aussi d’un désinvestissement scolaire ou de comportements « à risque » et nuisibles pour la santé : abus de drogues ou d’alcool, fugues, délinquance, désinvestissement scolaire soudain, automutilation, troubles alimentaires (anorexie, boulimie).
Les filles se plaignent plutôt de troubles somatiques (maux de ventre, insomnie, mal de dos (lombalgie) alors que les garçons ont tendance à souffrir d’agressivité ou de comportements asociaux.
Les idées suicidaires font souvent partie du tableau de la dépression de l’adolescent.
Peut-on évaluer le risque de suicide ?
Sept cents adolescents se suicident chaque année en France et le suicide est la seconde cause de mortalité chez les 15 à 24 ans.
Les idées de suicide sont fréquentes dans la dépression de l’adolescent (elles font d’ailleurs partie des signes de la maladie), elles méritent dans tous les cas d’être signalées à un médecin afin d’en parler et de les désamorcer. En effet, les adolescents suicidaires ne veulent pas nécessairement mourir mais souhaitent plutôt mettre fin à une souffrance psychique qui leur est devenue insupportable. Par ailleurs, l’immense majorité des personnes en proie à des idées de suicide ne feront pas de tentative de suicide.
Les antécédents de tentative de suicide sont un élément majeur du risque suicidaire, de même que des antécédents familiaux de suicide, car il existe une vulnérabilité génétique au suicide.
Certaines phases exposent à un risque immédiat de suicide et il en est ainsi de la « crise suicidaire ». Il s’agit d’un moment de la vie d’une personne où celle-ci se sent dans une impasse et confrontée à une telle souffrance que la mort apparaît progressivement comme le seul moyen de trouver une issue à cet état de crise. Cet état, caractérisé par des idées suicidaires de plus en plus envahissantes et un « sentiment d’impuissance » majeur doit être dépisté et pris en charge car il est réversible.
Combien de temps peut durer une dépression ?
Une dépression peut durer de quelques semaines à plusieurs mois, voire plusieurs années. La plupart des épisodes dépressifs durent moins de six mois et une guérison complète (disparition de tous les signes) et durable est possible.
Mais le risque de réapparition de la maladie après guérison complète est important (dans près de 50 % des cas). La réapparition des signes peut intervenir, soit longtemps après le premier épisode, à l’issue d’une rémission totale de plusieurs années, soit plus régulièrement, avec une rémission entre les épisodes de moins en moins complète et de moins en moins longue.
Quels sont les différents types de dépression ?
• Dans certains cas, la période dépressive s’étend sur plusieurs années. On parle alors de « dépression chronique » ou, lorsque les signes sont un peu moins nombreux et un peu moins intenses, de « dysthymie ». Les personnes souffrant de « troubles dysthymiques » se décrivent comme tristes en permanence avec une diminution d’intérêt et de plaisir qui provoquent une gêne ou un handicap dans la vie quotidienne. Il existe aussi des sentiments d’insuffisance, d’impuissance, de culpabilité et des ruminations à propos du passé qui peuvent alterner avec des sentiments d’irritation ou de colère. Au final, la personne qui souffre de dysthymie peut avoir tendance à s’effacer et à se mettre en retrait par rapport aux activités sociales et au travail, ce qui aboutit à une diminution d’activité et de productivité. Avec les années, ces troubles deviennent comme partie intégrante de la personnalité de cette personne. Cette maladie commence souvent de façon discrète et précoce (enfance, adolescence ou début de la vie adulte). Sa sévérité risque de s’accroître avec les années si elle n’est pas traitée.
• Des épisodes dépressifs peuvent aussi survenir dans le cadre d’un « trouble bipolaire », appelé autrefois « psychose maniaco-dépressive ». Dans ce cadre, l’épisode dépressif peut précéder ou suivre un « épisode maniaque », période de surexcitation intellectuelle et d’euphorie excessive qui est comme une forme « inversée » (« en miroir ») de la dépression. Au cours d’un tel épisode, le ralentissement dépressif est remplacé par une excitation et une agitation. Le pessimisme et la tristesse font place à un optimisme irréaliste et une familiarité souvent excessive, voire déplacée. La personne est envahie par un besoin excessif de parler, de bouger. Elle ne ressent plus le besoin de dormir et peut dans certains cas avoir des idées délirantes (invincibilité, pouvoirs extraordinaires…). Cet état provoque des conduites insouciantes ou irresponsables (dépenses délirantes, comportements sexuels frénétiques et à risque), des attitudes déplacées, toutes conduites susceptibles d’entraîner des dégâts considérables et irréversibles dans la vie familiale et professionnelle. L’épisode maniaque n’est donc pas à prendre à la légère : c’est une « urgence psychiatrique », en raison des risques que la personne fait courir à elle-même et à son entourage. Dans certains cas, il est même nécessaire de mettre temporairement la personne sous sauvegarde de justice, afin de la protéger des actes inconsidérés qu’elle pourrait commettre. Le traitement de cette maladie est très spécifique et différent de celui de la dépression.
• Certaines dépressions sont induites par la survenue de l’hiver : on parle de « dépression saisonnière », une forme de dépression qui pourrait toucher une personne sur 10 en France (fréquence supérieure dans les pays du nord). Ces dépressions saisonnières sont à différencier du « blues hivernal » car elles ont des signes clairs de dépression : la personne se sent triste, elle a des idées noires, passe beaucoup de temps au lit, abandonne ses activités préférées et a souvent des comportements de compensation alimentaire, notamment avec une appétence particulière pour les aliments sucrés, ce qui lui fait prendre du poids. C'est un phénomène cyclique qui disparaît au printemps mais revient chaque année en hiver. Le traitement de référence est la « luminothérapie » qui consiste à s'exposer à une lampe spéciale diffusant une lumière de forte intensité : 10 000 lux pendant 30 minutes, chaque jour pendant 2 semaines. A titre de comparaison, la lumière du jour par beau temps est de 100 000 lux, mais celle d'une pièce éclairée artificiellement de seulement 200 à 300 lux. Il n'est pas nécessaire de fixer la lampe, travailler ou lire à proximité suffit. Les antidépresseurs, qui sont parfois prescrits lorsque le médecin n'a pas fait le lien entre la dépression et le changement de saison, sont moins efficaces alors que les malades sont soulagés par la luminothérapie en une à 2 semaines.
Quelles sont les maladies qui peuvent être associées à la dépression ?
La dépression peut avoir des liens avec d’autres maladies, psychologiques ou physiques et en particulier de troubles anxieux (l’existence d’un trouble anxieux précédant ou associé à la dépression accroîtrait la sévérité de la dépression, ainsi que son risque de survenue), d’alcoolisme, de dépendance à certains médicaments (anxiolytiques ou hypnotiques) ou d’abus de substances psychotropes (cannabis, ecstasy, cocaïne).
Par ailleurs, l’association d’un trouble dépressif à une maladie physique (« somatique ») grave ou chronique (diabète, cancer, accident vasculaire cérébral…) peut rendre l’identification et le traitement de la dépression plus difficile (les signes de la dépression pouvant être sous-estimés et attribués à l’autre maladie).
Pourquoi faut-il traiter une dépression ?
La dépression est une maladie qui est associée à une perturbation du fonctionnement du cerveau : elle affecte l’ensemble de la pensée ainsi que la personnalité. La volonté seule ne suffit pas pour agir sur une maladie aussi complexe. Un traitement est donc absolument nécessaire quand on souffre de dépression.
La nécessité d’un traitement est une idée parfois difficile à accepter pour certains malades. Pour des raisons psychologiques et culturelles (tendance à penser qu’il serait préférable de « s’en sortir par soi-même », que se faire soigner serait une « facilité »…), mais aussi en raison d’une certaine « paralysie de la volonté » liée à la maladie elle-même, le malade ne peut pas s’en sortir tout seul. Mais, se faire soigner, suivre une psychothérapie ou un traitement médicamenteux, c’est aussi redevenir acteur de son destin.
La guérison d’un trouble psychique nécessite une participation et un engagement importants de la part du malade. Une prise en charge thérapeutique est le fruit d'une collaboration entre le médecin généraliste, le psychiatre et éventuellement d'autres professionnels de santé. Le rôle de l’entourage ne doit pas non plus être sous-estimé, dans la mesure où il peut protéger un malade qui a perdu confiance en lui.
Quel est le traitement de la dépression ?
Avant de mettre en route un traitement, il faudra toujours évaluer le risque de suicide et donc ne pas hésiter à aborder systématiquement ce sujet avec le malade. L’autre préalable important au traitement est de rechercher s’il n’y a pas des antécédents de dépression récidivante, soit chez le malade lui-même, soit dans sa famille, voire de troubles bipolaires (avec alternance de dépression et d’épisodes maniaques).
Lorsqu’une dépression est diagnostiquée chez un enfant ou un adolescent, le traitement consiste d’abord en la mise en place de mesures de soutien psychothérapeutique (familial ou individuel) avec l'aide d'un professionnel du psychisme des enfants (« pédopsychiatre »). Il peut également se révéler nécessaire de modifier l’environnement de l’enfant (par exemple le changer d’école) s’il est malheureux là où il est. Le consensus en France est que la psychothérapie reste le traitement de première intention. La psychothérapie est recommandée, quel que soit le type de dépression. Il y a différents types de psychothérapies (interpersonnelle, cognitivo-comportementale, psychodynamique…) dont l’efficacité a été validée. Une psychothérapie agit sur des comportements qui peuvent favoriser l'apparition ou la persistance d'une dépression.
Chez les adolescents, le traitement psychothérapeutique systématiquement mis en place peut s’accompagner d’un traitement à l’aide de médicaments si la dépression est sévère et durable ou si la psychothérapie ne suffit pas à soulager rapidement les signes. Depuis quelques années, il existe une remise en cause de l’usage des médicaments antidépresseurs chez les jeunes patients, et en particulier les adolescents. En effet, les études ont montré que les médicaments utilisés contre la dépression peuvent, chez ce type de patient, augmenter le risque de comportement suicidaire ou hostile (colère, agressivité, opposition systématique aux adultes). Il est admis que les traitements médicamenteux n’ont que peu d’effets sur les dépressions de l’enfant et de l’adolescent et seule la fluoxétine est autorisée en France pour la dépression de l’enfant et du jeune adolescent. Une méta-analyse publiée dans le « Lancet » portant sur quatorze médicaments relève que la plupart des antidépresseurs disponibles ne sont guère efficaces et ne sont pas supérieurs au placebo et qu’une seule molécule, la fluoxétine, a un effet bénéfique.
Les enfants et les adolescents qui prennent des antidépresseurs doivent être très surveillés, quel que soit l’antidépresseur choisi, en particulier au début du traitement. Ces prescriptions doivent être réservées à l’hôpital et ne pas être effectuées en médecine générale, afin de regarder de près d’éventuels effets secondaires, surtout le risque suicidaire. De plus, la biologie de l’enfant et de l’adolescent, sous l’effet des hormones sexuelles, mérite une attention particulière quand on prescrit des médicaments.
Les antidépresseurs mettent deux à quatre semaines avant d’agir et la prise régulière du traitement est indispensable. Une fois l'amélioration obtenue, ils sont poursuivis pendant quatre à six mois minimum pour consolider les résultats obtenus au cours des premières semaines. Un arrêt précoce du traitement est souvent à l'origine de récidives de la dépression. L'arrêt du traitement doit être discuté avec le médecin et doit se faire progressivement, sur plusieurs semaines.
Si le risque suicidaire est élevé et si le médecin estime qu'il s'agit d'une urgence, une hospitalisation doit être envisagée. En dehors de cette situation d'urgence, l'hospitalisation peut également être prescrite pour évaluer une situation complexe ou lors d'un changement de traitement.
D’autres médicaments peuvent être prescrits, comme le lithium dans certaines formes de dépression ou un anxiolytique s’il existe une anxiété associée, voire même des antipsychotiques dans les dépressions résistantes.
Quels sont les autres traitements de la dépression ?
La luminothérapie est préférable dans les formes de dépression saisonnières. Elle consiste à exposer les yeux à une lumière dont la nature est proche de celle du soleil mais sans les infra rouges ni les ultra violets qui sont dangereux pour la peau et les yeux. Elle a une forte intensité : 10 000 lux, ce qui est très supérieur à la lumière dans les pièces (200 à 300 lux), pendant 30 minutes, chaque jour pendant 2 semaines.
La stimulation magnétique transcrânienne est une alternative thérapeutique possible pour les personnes souffrant de dépression sévère résistante à tous les médicaments. Elle n’est toutefois pas efficace dans tous les cas. Plusieurs études ont montré de bons résultats sur des dépressions résistantes à tous les médicaments. Cette technique consiste à appliquer une bobine magnétique à proximité du cerveau pour en stimuler certaines zones. Il s’agit notamment du cortex préfrontal, connecté à des structures sous-jacentes dont l’amygdale impliquée dans la dépression. La bobine génère un courant magnétique à haute fréquence qui induit un courant électrique au niveau des structures cérébrales, produit une dépolarisation neuronale et active les cellules nerveuses. Le champ délivré est d'une intensité similaire à celui produit lors d'une imagerie par résonance magnétique (IRM). Cette technique a malheureusement ses limites : elle n’est pas efficace chez tous les patients, elle est longue à pratiquer et très coûteuse. A ce titre, l’identification de facteurs prédictifs de réponse à ce traitement serait utile aux praticiens.
Quel est le rôle de la famille ?
De vieilles études ont montré que l’implication de la famille facilitait la récupération et même accélérait la récupération symptomatique. La famille doit donc soutenir et protéger le malade, en l’accompagnant de façon bienveillante et en évitant les incitations du genre : « secoue-toi un peu, enfin » ce que le malade est par définition incapable de faire.
Il faut vraiment que la famille soit impliquée dans le soin et aussi au moment de l'évaluation. Il y a des enfants qui disent qu'ils ne fonctionnent pas trop mal, alors qu'en fait, la famille explique « qu'il a dit ça mais en fait il n’arrive absolument pas à faire les choses ». « C'est vrai qu'il est mieux, qu'il est moins triste, moins anxieux, mais il ne fait pas grand-chose ».
Quelle est la fréquence des signes gênants après guérison ?
On parle de « symptômes résiduels » lorsque l'état dépressif s'améliore, mais que certains troubles persistent. La « rémission symptomatique » est, en effet, définie par les médecins comme une diminution des scores en dessous de 7 sur « l'échelle de Hamilton », qui est l'échelle la plus classique d'évaluation des signes dépressifs.
Or, des études ont montré que près d’un quart des malades qui sont en rémission après traitement, selon l’échelle de Hamilton, pouvaient garder des difficultés de concentration, des troubles du sommeil, un peu de fatigabilité et des difficultés à prendre des décisions : ils sont donc encore handicapés dans le domaine social et professionnel (« trouble du fonctionnement social »).
Comment aider un enfant ou un adolescent dépressif ?
Le suivi de la dépression sur le long terme est important. Le traitement (psychothérapie associée ou non à des antidépresseurs) doit dans l’idéal être mis en place rapidement. Son suivi régulier, prévient les complications de la dépression, comme le risque suicidaire, le passage à la chronicité et les récidives.
Le plus important pour que le malade suive bien son traitement est d’abord qu’il soit persuadé que la dépression est une maladie, que le traitement est utile et qu’il ait accepté de se faire soigner. L’autre élément important est que le malade ait une bonne relation avec le professionnel choisi pour la psychothérapie (psychiatre, psychologue).
En tant que parents, il faut garder l’œil ouvert sur de soudains changements de comportement de l’enfant. La situation peut s’aggraver rapidement. Un enfant n’a pas la force nécessaire pour surmonter sa détresse et il a besoin de l’aide de ses parents et de leur attention.
Il est très important de le rassurer et de lui dire qu’il aura toujours le soutien et l’affection de ses parents. Il faut absolument rester présent dans son quotidien et l’accompagner dans ses diverses activités. Il faut garder du temps pour discuter avec l’enfant et l’écouter, il doit sentir que ses parents sont attentifs à ses soucis.
S’il choisit de se confier à une autre personne (grands-parents, oncles, tantes, amis de la famille ou enseignants…), les parents ne doivent pas se vexer et se sentir exclus. L’essentiel est que l’enfant ou l’adolescent ne reste pas seul avec sa souffrance et que la discussion soit un exutoire pour lui. Il peut montrer une certaine pudeur à parler à ses parents et se sentir plus à l’aise avec une tierce personne.
Si la situation ne s’améliore pas, voire si son état s’aggrave, les parents ne doivent pas hésiter à consulter rapidement. Un épisode dépressif chez l’enfant peut se répéter à l’adolescence ou à l’âge adulte. Les enfants qui ont souffert de ce type de trouble psychologique doivent être suivis régulièrement et apprendront, peu à peu, à vivre avec leur vulnérabilité.
Une hygiène de vie peut participer à la guérison. Il faut adopter des horaires de vie réguliers et dormir suffisamment, quitte à se faire aider par un traitement dans un premier temps. Pratiquer une activité physique régulière joue un rôle important au cours de la dépression et il est nécessaire de trouver une activité physique au moins 30 minutes, trois à cinq fois par semaine.
Un régime alimentaire équilibré peut être intéressant en privilégiant les fruits et les légumes frais, ainsi que les poissons et les huiles végétales.
La dépression de l’enfant et de l’adolescent en France
La dépression est une des maladies psychiques les plus fréquentes.
On estime que la dépression frappe 0,5 % des enfants français, ce qui représente environ 45 000 cas chaque année. Environ 3 % des adolescents connaissent une période de dépression, et deux tiers d’entre eux sont des filles.
Les liens de la dépression
Le site de l’INSERM
http://www.inserm.fr/thematiques/neurosciences-sciences-cognitives-neurologie-psychiatrie/dossiers-d-information/depression
Le site de l’Association France Dépression
http://www.france-depression.org/
Les liens internes à Pourquoi Docteur
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