Douleur chez l’enfant : mieux l’évaluer pour bien la traiter
La douleur est une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable qui correspond le plus souvent à un signal d’alarme à explorer. Jusqu’à une période récente, les nouveau-nés et les bébés étaient réputés peu sensibles à la douleur puisque l’expression de la douleur est difficile sans recours à la parole. Avec un ajustement des moyens d’évaluation en fonction de l’âge, le traitement devient plus adapté et plus efficace.
Des mots pour les maux
Une douleur peut être aiguë ou chronique (plus de 3 mois). Entre les deux, on trouve la douleur subaiguë.
La douleur peut être liée à une stimulation des récepteurs de la douleur (piqûre, inflammation, brûlure…) : c’est la douleur « nociceptive ».
La douleur peut être liée à un dysfonctionnement du système de la douleur : c’est la douleur « neurogène » ou « neuropathique ».
La douleur cancéreuse est classée à part, car elle emprunte aux deux autres douleurs.
Qu'est-ce que la douleur ?
La douleur est une sensation complexe qui est indissociable de la conscience, ainsi que de l’émotion qu’elle suscite. La douleur est donc un phénomène subjectif qui repose avant tout sur le ressenti de l’enfant, ce qui la rend difficile à quantifier et à qualifier.
Il existe plusieurs types de douleurs, qui mettent en jeu un circuit neurologique particulier dans l’organisme. La douleur aiguë classique, ou « nociceptive », a essentiellement un rôle d’alarme qui va permettre à l’organisme de réagir et de se protéger face à une agression mécanique, chimique ou thermique. Dans beaucoup de cas, cette douleur est liée à une maladie qui fait intervenir la compression, la distension, la privation d’oxygène (« ischémie ») ou l’inflammation d’un organe, mais ce sont in fine les mêmes mécanismes.
Si la douleur devient chronique, le mécanisme est différent et fait intervenir un dysfonctionnement du système nerveux qui traite habituellement le message de la douleur (« circuits de la douleur »). La douleur devient dans ce cas une maladie à part entière et on parle de douleur « neurogène » ou « neuropathique ».
En cas de cancer, le mécanisme de la douleur est plus complexe et associe souvent des mécanismes neuropathiques et des mécanismes nociceptifs, en particulier compressifs et inflammatoires : on parle de « douleurs cancéreuses ».
Chez l’enfant, une douleur chronique peut avoir des effets négatifs durables sur sa santé : troubles du sommeil, perte de poids, ralentissement de la croissance... Pour cette raison, il faut systématiquement la soulager.
Comment est véhiculé le message de la douleur ?
Classiquement, un signal douloureux, que ce soit une brûlure, une piqûre ou un écrasement, par exemple de la main, va stimuler les terminaisons nerveuses de la peau (également présentes dans d’autres tissus : muscles, articulations, intestins, membrane autour de l’os, capsule articulaire, ligaments). Après avoir été stimulées, ces terminaisons nerveuses vont transmettre un message douloureux via des cellules nerveuses spécialisées : les « neurones nocicepteurs », jusqu’à la moelle épinière, site des premiers relais entre ces cellules nerveuses et les neurones suivants dans les « circuits de la douleur » du système nerveux central, puis au cerveau, jusqu’au « cortex cérébral », siège de la conscience. C’est uniquement dans le cerveau que ce signal est identifié comme une souffrance et une douleur.
Cependant, avant même que le cerveau n'ait conscience de ce signal douloureux, la main aura été écartée de la source de chaleur ou de piqûre grâce à un réflexe qui fait intervenir un « arc réflexe court » impliquant uniquement la moelle épinière (neurone « afférent » qui véhicule la douleur en lien direct avec le neurone « effecteur » de la contraction musculaire dans la moelle épinière). C’est également au niveau de la moelle épinière que les premiers systèmes de rétrocontrôle interviennent : il s’agit d’un mécanisme de protection contre la douleur qui implique des neurotransmetteurs, comme le « GABA », ou des « endorphines ». Dans certaines conditions, d’autres systèmes peuvent également exacerber l’information douloureuse.
Quels sont les signes de la douleur chez l’enfant ?
L’expression de la douleur chez les bébés et les très jeunes enfants est rendue difficile par l’impossibilité qu’ils ont de recourir à la parole.
La douleur des nouveau-nés se traduit essentiellement par des modifications du comportement. Les cris et les pleurs sont significatifs, mais aussi l’attitude générale, l’agitation ou, au contraire, une attitude particulière où l’enfant a moins mal (« attitude antalgique »), le refus d’être couché sur la zone douloureuse, une raideur du corps (« rejet en arrière »), les changements de teint (pâleur ou rougeur), les troubles du sommeil. Certaines douleurs sont parfois associées à des signes, comme la transpiration, les palpitations cardiaques et l’accélération du pouls et de la respiration, l’augmentation de la tension artérielle...
Si la douleur se prolonge, le visage de l’enfant devient inexpressif, il se tient immobile, il refuse de jouer et de communiquer et arrête de s’alimenter.
À mesure qu’ils grandissent, le bébé et le jeune enfant peuvent exprimer de plus en plus précisément leurs sensations douloureuses. L’acquisition de la parole facilite la désignation et la description des douleurs, mais pas au même niveau de détail que chez l’adulte.
Une douleur chronique peut avoir des effets négatifs sur la santé de l’enfant, avec troubles du sommeil, perte de poids, ralentissement de la croissance, qui vont parfois être au premier plan, voire résumer le tableau.
Comment les médecins classent-ils les douleurs ?
• Habituellement, la douleur est divisée en 3 catégories en fonction de sa durée. La douleur aiguë est d’apparition brutale, intense mais souvent brève : c’est ce qu’on ressent en se brûlant ou en se coupant le doigt, par exemple. La douleur est dite chronique lorsque la douleur persiste au-delà de trois mois. Il s’agit d’une douleur plus particulière, qui fait alors intervenir un dysfonctionnement des circuits neurologiques de la douleur, et dont le traitement est plus complexe. C’est pourquoi les médecins définissent, entre les deux, la douleur subaiguë, qui est une douleur qui dure au moins 6 semaines et moins de 3 mois et qui doit absolument être prise en charge pour éviter le passage à la chronicité. Cette douleur subaiguë ferait le lit de la douleur chronique, mais serait toutefois plus simple à traiter, ce qui permettrait de prévenir le passage à la chronicité. Ce phénomène a pu être vérifié dans la lombalgie où le traitement intensif de la lombalgie subaiguë peut prévenir le passage à la chronicité.
• Par ailleurs, dans une perspective diagnostique, les médecins classent aussi les douleurs en fonction de leur horaire. La « douleur inflammatoire » est souvent une douleur nocturne, maximale dans la 2e partie de la nuit et le matin au réveil où elle s’accompagne d’une raideur qui est responsable d’un dérouillage matinal prolongé (plus de 30 minutes). Cette douleur inflammatoire tend à s’estomper dans la journée avec l’activité. La « douleur mécanique », en revanche, apparaît à l’utilisation du segment de membre ou de colonne vertébrale et est calmée par le repos dans une position propre.
• Enfin, il est possible de classer les douleurs en fonction de leur intensité mesurée sur une échelle, échelle visuelle analogique (EVA) ou numérique (EN) de la douleur chez l’adulte et échelles spécialisées chez le nourrisson et le jeune enfant. La douleur est qualifiée de « faible à modérée » en cas de mesure inférieure à 40 mm sur l’EVA, de douleur « modérée à sévère » en cas de mesure EVA comprise entre 40 et 70 mm, et de « très intense » en cas de mesure EVA supérieure à 70 mm.
Quelles sont les causes de la douleur ?
Au-delà, il existe une classification selon le contexte, sinon selon le mécanisme exact responsable de la douleur chronique. Trois formes de douleurs chroniques peuvent être distinguées selon le contexte :
• Les « douleurs nociceptives » aiguës et chroniques sont liées à l’apparition et à la persistance de la cause, le plus souvent inflammatoire : elles recouvrent toutes les douleurs associées aux rhumatismes, aux sciatiques, aux traumatismes, aux maladies infectieuses comme les otites...
• Les « douleurs neuropathiques » sont associées à des dysfonctionnements des circuits de la douleur dans le système nerveux central et périphérique : lésion de la moelle épinière, du nerf sciatique, du ganglion spinal (comme dans la douleur post-zostérienne).
• Les « douleurs cancéreuses » sont plus complexes et associent souvent une composante à la fois inflammatoire et neuropathique.
Comment faire le diagnostic devant une douleur chez l’enfant ?
Toute douleur aiguë doit déboucher sur un diagnostic, qu’elle soit articulaire, musculaire, thoracique, abdominale ou qu’elle touche les membres, la tête et le cou.
Certaines de ces douleurs aiguës peuvent également être des urgences chirurgicales, ce qui impose une démarche diagnostique accélérée. Le diagnostic n’est alors parfois avéré dans ce cas que lors de l’intervention chirurgicale.
Une douleur chronique peut avoir des effets négatifs durables sur la santé de l’enfant : troubles du sommeil, perte de poids, ralentissement de la croissance.
L’enquête diagnostique soigneuse et l’imagerie moderne permettent néanmoins de trouver une cause dans la plupart des cas.
Dans les douleurs neurogènes, la cause originelle de la douleur a le plus souvent disparu depuis longtemps, et il ne sert à rien de multiplier les examens. La stratégie va se concentrer avant tout sur le soulagement de la douleur à l’aide de combinaison de diverses molécules et techniques.
De nouvelles techniques d’imagerie fonctionnelle (IRM-f) apporteront vraisemblablement une aide dans l’évaluation quantitative et qualitative (il y a souvent plusieurs composantes dans la douleur chronique) de la réponse au traitement.
Comment évaluer la douleur ?
La douleur étant une sensation éminemment subjective, les médecins se sont donc attachés à développer des moyens d’évaluation les plus objectifs possibles pour essayer d’adapter les traitements disponibles au mieux des besoins des malades : les « échelles d’évaluation ».
Ces outils d’évaluation reposent essentiellement sur des questionnaires ou des échelles de la douleur, qui aident le médecin à mieux évaluer ce que l’enfant ressent. Il en existe plusieurs types, selon l’âge et les capacités d’expression de l’enfant. Ces échelles sont particulièrement utiles pour contrôler l’efficacité d’un traitement contre la douleur.
Pour les nouveau-nés, il est possible d’utiliser « l’échelle EDIN » (Échelle de Douleur et d’Inconfort du Nouveau-né) qui est la seule grille permettant l’évaluation de la douleur prolongée chez le nouveau-né. Elle est simple, rapide et c’est une échelle validée.
Visage |
0 = Visage détendu |
Corps |
0 = Détendu |
Sommeil |
0 = S’endort facilement, sommeil prolongé et calme |
Relation |
0 = Sourire aux anges, sourire réponse, attentif à l’écoute |
Réconfort |
0 = N’a pas besoin de réconfort |
Le score varie entre 0 et 15 : au-dessus de 5, la douleur est probable ; en deçà, on évoque plutôt l’inconfort que la douleur.
Pour évaluer la douleur de l’enfant de moins de 7 ans aux urgences, on recommande « l’échelle EVENDOL », qui doit être utilisée en 2 temps : à l’arrivée aux urgences, en dehors de tout soin anxiogène, puis lors de l’examen ou de la mobilisation de la zone douloureuse.
EVENDOL comporte 5 items comportementaux simples.
• Expression vocale ou verbale : l’enfant pleure et/ou crie et/ou gémit et/ou dit qu’il a mal.
• Mimique : l’enfant a le front plissé, et/ou les sourcils froncés et/ou la bouche crispée.
• Mouvements : l’enfant s’agite et/ou se raidit et/ou se crispe.
• Positions : l’enfant a une attitude inhabituelle et/ou antalgique, et/ou se protège et/ou reste immobile.
• Relation avec l’environnement : l’enfant peut être consolé et/ou s’intéresse aux jeux et/ou communique avec l’entourage.
Pour chaque item, 4 cotations sont possibles, en tenant compte à la fois de l’intensité et de la permanence du signe pendant le temps d’observation (0 = signe absent ; 1 = signe faible ou passager ; 2 = signe moyen ou environ la moitié du temps ; 3 = signe fort ou quasi permanent).
En dehors de l’urgence, les médecins utilisent une « échelle PFS » (Pain Face Scale) à 6 gradations avec 6 visages dont l’expression passe de « sourire » à « visage tordu par la douleur ».
Quand faut-il consulter en urgence pour une douleur ?
Une douleur aiguë est potentiellement grave dès qu'un seul des critères suivants est présent :
• Elle survient à la suite d’un traumatisme.
• Elle s’inscrit dans un contexte d’immunodépression.
• Elle est brutale et d’emblée intense, puis elle dure de façon continue plus de trois heures.
• Elle s'accompagne de signes associés intenses (fièvre, vomissements, ballonnement, contracture des muscles, diarrhée...).
• Elle s'accompagne d’une altération rapide de l’état général : pouls faible voire filant, baisse ou chute de la pression artérielle, fièvre.
Dans ce cas, il faut consulter très vite aux urgences, et le mieux est d’appeler le SAMU.
Quels sont les différents médicaments de la douleur ?
Les principaux médicaments antidouleur (antalgiques) classiques sont divisés en trois classes en fonction de leur puissance d’action. Chaque classe correspond théoriquement à un niveau de la douleur mesuré initialement par une mesure objective, et en particulier avec une échelle numérique (EN) ou une échelle visuelle analogique de la douleur (EVA).
• La douleur « faible à modérée » (mesure inférieure à 40 mm sur l’EVA) relève des antalgiques de niveau I : paracétamol, aspirine et anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) tels que l’ibuprofène, le kétoprofène…
• La douleur « modérée à sévère » (mesure EVA comprise entre 40 et 70 mm) se voit indiquer en première intension un antalgique de niveau II : codéine, poudre d’opium ou tramadol, seuls ou en association au paracétamol.
• La douleur « très intense » (mesure EVA supérieure à 70 mm) revendique d’emblée d’un antalgique de niveau III : morphine et autres dérivés de l’opium (buprénorphine, fentanyl, hydromorphone, nalbuphine, oxycodone et péthidine).
Mais d’autres molécules peuvent également être utilisées pour combattre la douleur, comme des anesthésiques locaux pour les douleurs localisées (lidocaïne, procaïne, bupivacaïne...), désormais disponibles sous forme de patchs pour certaines d’entre elles, ou des antispasmodiques intestinaux (utiles dans les douleurs viscérales, comme les coliques néphrétiques ou les douleurs intestinales).
Pour les douleurs neurogènes, les antalgiques classiques ne sont pas très efficaces et il est nécessaire de recourir à des molécules psychotropes (antidépresseurs et antiépileptiques) dont le principal intérêt est d’interférer avec la transmission des messages chimiques entre les cellules nerveuses, mais dont les effets indésirables limitent parfois l’utilisation. Ces médicaments agissent essentiellement au niveau de l’articulation entre les différentes cellules nerveuses au niveau de ce que les médecins appellent la « synapse ». C’est le cas de certains antidépresseurs et des antiépileptiques qui sont parfois utilisés dans le traitement des névralgies rebelles de la face et des douleurs neuropathiques.
À côté des médicaments, d’autres techniques sont disponibles pour soulager les douleurs. Elles relèvent de la chirurgie ou de la neurostimulation ou de l’anesthésie (« analgésie gazeuse »), ou sont issues de médecines traditionnelles (acupuncture, massages, manipulations).
De plus, dans le cadre des petits accidents de la vie quotidienne et des loisirs, l'application de froid est une méthode efficace de réduction de la douleur aiguë.
Quels sont les principes du traitement de la douleur ?
En cas de douleur, l’utilisation de médicaments antidouleurs (les « antalgiques ») est tout à fait justifiée et ce, dès la naissance. En effet, il faut savoir que la répétition et la multiplication de douleurs en bas âge entraînent des mémorisations de douleur durables. Ces dernières auront ultérieurement des conséquences dans le ressenti douloureux et le comportement face à une douleur.
Les douleurs nociceptives sont correctement prises en charge par différents antalgiques de référence : le paracétamol, l’aspirine ou encore la morphine et ses dérivés, pour les douleurs les plus rebelles. Ces médicaments sont efficaces contre des douleurs aiguës, mais présentent des effets secondaires non négligeables s’ils sont utilisés de façon prolongée, voire chronique (troubles gastriques et rénaux, tolérance et dépendance à la morphine…).
Les douleurs neuropathiques, liées le plus souvent à une lésion du système nerveux, répondent très mal aux antalgiques traditionnels, exceptés certains opioïdes. Mais les effets secondaires de ces derniers à long terme ne permettent pas de les utiliser à forte dose pour des douleurs chroniques. Les traitements aujourd’hui utilisés sont basés sur des associations d’antalgiques avec les antidépresseurs et/ou les antiépileptiques. Ces deux derniers types de médicaments ont une action antalgique différente et provoquent moins d’effets indésirables. Mais ils ont une efficacité modérée chez pratiquement 50 % des enfants.
Les douleurs cancéreuses sont basées sur l’association de morphiniques et d’anti-inflammatoires, voire d’antidépresseurs ou d’antiépileptiques.
Comment utiliser les médicaments dans la douleur de l’enfant ?
L’organisme de l’enfant est en développement rapide, et les modifications physiologiques de sa croissance modifient le devenir des médicaments dans l’organisme et l'action de certains médicaments. Beaucoup de médicaments utilisables chez l‘adulte le sont aussi en pédiatrie, mais à des dosages adaptés+++.
• Le paracétamol est l’antalgique de niveau I de première intention dans les douleurs faibles à modérées. On ne connaît pas exactement son mode d’action antalgique : il a longtemps été classé comme antalgique périphérique, mais on pense désormais que son mode d’action est central non morphinique. Il est prescrit à la dose de 60 mg par kg de poids et par jour, mais sa durée d’action est courte, 2 à 3 heures dans la majorité des cas, ce qui impose de la prendre en 4 prises par jour, sans dépasser 80 mg/kg/jour chez l’enfant sans insuffisance hépatique.
• Les anti-inflammatoires non-stéroïdiens existent sous diverses molécules et présentations, mais seul l’ibuprofène est recommandé en France. Ils sont principalement anti-inflammatoires mais aussi antalgiques à plus faible dose, en particulier pour une molécule comme l’ibuprofène, que l’on trouve dans le commerce sous diverses présentations. L’avantage par rapport au paracétamol est qu’ils peuvent avoir une durée d’action plus prolongée permettant 3 prises par jour : ibuprofène 20 à 30 mg par kg et par jour. L’inconvénient est qu’ils exposent à des risques d’accidents digestifs (ulcères gastroduodénaux avec risque d’hémorragie digestive), un risque d’insuffisance rénale, en particulier chez l’enfant déshydraté.
• Les antalgiques de niveau II sont basés sur le tramadol, généralement administrés en 4 prises par jour, chez l’enfant à partir de 3 ans. La codéine, qui était auparavant utilisée chez l’enfant à partir de 1 an, est désormais réservée aux enfants de plus de 12 ans et seulement sous conditions, en raison d’effets secondaires. Le tramadol doit être administré en 4 prises par jour (1 mg par kg de poids et par prise en 4 prises par jour) et il a un effet antalgique supplémentaire à l’effet opioïde : il existerait une action monoaminergique par inhibition de la recapture de la noradrénaline et de la sérotonine qui exercerait un effet antalgique au niveau médullaire. L’inconvénient est que le tramadol est parfois à l’origine de nausées, de vomissements.
• Les antalgiques de niveau III, ou « opioïdes forts », ont une action antalgique « centrale » (dans le cerveau) au niveau des récepteurs opioïdes. On utilise la morphine à la posologie initiale de 0,2 mg par kg de poids et par prise en 6 prises par jour (maximum 20 mg par jour). Chez les enfants de moins de 1 an, la posologie est de 0,1 mg par kg de poids et par prise en 6 prises par jour (parallèlement à une surveillance renforcée). En cas de douleur très intense, une « dose de charge » de 0,4 à 0,5 mg par kg de poids peut être utilisée. Il existe des formes injectables et orales, et parmi ces dernières, des formes à libération immédiate et des formes à libération prolongée. Le principe est de rechercher la dose efficace avec des formes à libération immédiate (dont la durée d’action est d’environ 4 heures) : c’est la « titration » ; puis de remplacer les formes à libération immédiate par 2 prises quotidiennes d’une forme à libération prolongée qui couvre mieux les 24 heures et évite les « trous thérapeutiques ». Les formes à libération immédiate peuvent être additionnées pour l’ajustement des doses aux « pics de douleur ».
En dehors de l’accoutumance et de la dépendance psychique et physique, la morphine a des effets secondaires :
- constipation (à prévenir dès le début de la prescription avec des mucilages et des fibres alimentaires et une bonne hydratation),
- nausées et vomissements en début de traitement (à prévenir par des « antiémétiques » tels que la dompéridone, le métoclopramide ou la métopimazine ou exceptionnellement les antagonistes des récepteurs 5-HT3 de la sérotonine),
- dépression respiratoire (rare mais possible, ce qui impose de surveiller la fréquence respiratoire au cours de la titration),
- sédation et somnolence (qui peuvent être un signe de surdosage),
- confusion mentale et dysphorie chez le sujet âgé,
- rétention d’urine,
- sécheresse buccale.
• Les antalgiques locaux peuvent avoir un intérêt : composés de lidocaïne, ils permettent d’obtenir une anesthésie plus ou moins profonde de la peau ou des muqueuses (jusqu’à 5 mm en profondeur). On peut les utiliser avant une injection, une ponction, une pose de cathéter, certaines interventions superficielles sur la peau ou avant des soins dentaires. Des patchs existent chez l’adulte pour les douleurs post-zostériennes.
• L'analgésie gazeuse est obtenue en faisant inhaler à un enfant de plus de quatre ans un mélange d’oxygène et de protoxyde d’azote (à parts égales), un gaz connu pour son effet antalgique, anxiolytique et euphorisant (« gaz hilarant »). L’inhalation au masque doit durer au moins trois minutes. Cette méthode est simple (pas de jeûne préalable), sûre et sans aucun danger. Elle permet d’effectuer sans douleur des examens (ponctions, biopsies), des soins (injections, infiltrations) ou de petites interventions d’urgence (sutures).
Comment utiliser les médicaments dans la douleur neurogène ?
Différentes molécules sont utilisées (antalgiques et non-antalgiques). Le principe est de ne pas prendre de doses trop fortes pour chaque molécule, car le gain d’efficacité est minime alors que le risque d’effets indésirables augmente très vite. Il s’agit donc plutôt de rechercher la meilleure association de molécules à dose modérée.
• Les antalgiques classiques ne sont généralement que peu efficaces dans la douleur neurogène, en dehors des morphiniques à dose modérée, en se rappelant que l’objectif n’est pas de prescrire ces molécules sur des périodes trop prolongées du fait du risque d’accoutumance et de dépendance. Le tramadol est une molécule intéressante du fait de sa double action : action sur les récepteurs mu cérébraux et action monoaminergique au niveau de la moelle épinière.
• Les antidépresseurs utilisés dans les douleurs neurogènes sont le plus souvent des molécules tricycliques déjà anciennes, et en particulier l’amitriptyline, qui a une action avérée sur les douleurs neurogènes périphériques et est disponible en gouttes (0,3 à 1 mg par kg et par jour en 1 ou 2 prises). Leurs effets secondaires sont dépendants de la dose (sécheresse de la bouche, constipation, sueurs, troubles visuels, palpitations, rétention urinaire, troubles cognitifs, confusion, hypotension orthostatique avec risque de chutes notamment chez le sujet âgé). Les autres antidépresseurs ne peuvent être recommandés en l’absence d’étude chez l’enfant.
• Parmi les antiépileptiques, l’efficacité de la gabapentine est démontrée dans les douleurs neurogènes périphériques et centrales de l’enfant à la dose de 10 à 30 mg par kg et par jour en 3 prises. Ce traitement agit vraisemblablement en réduisant les phénomènes de sensibilisation centrale. Les effets indésirables les plus fréquents incluent : impression vertigineuse, somnolence, fatigue, prise de poids, œdèmes périphériques, céphalées et bouche sèche.
• Contrairement aux idées reçues, la morphine et le tramadol sont efficaces sur la douleur neuropathique de l’enfant.
D’autres traitements sont étudiés et paraissent prometteurs.
Y a-t-il des traitements non-médicamenteux de la douleur ?
De nombreuses prises en charge non médicamenteuses sont aujourd’hui utilisées dans la prise en charge de la douleur chronique, en plus du traitement médicamenteux.
Chez l'enfant de moins de trois mois, une solution sucrée concentrée, associée à la succion d’une tétine, stimule la production d’endorphines dans le cerveau et diminue les sensations douloureuses. Ce protocole validé permet de réduire la douleur ressentie lors des petits gestes, tels que les prises de sang, les pansements, la pose et le retrait de sondes... L’effet antidouleur dure environ cinq minutes et cette méthode ne comporte aucun effet indésirable.
Electrostimulation transcutanée, acupuncture, relaxation, sophrologie, ou hypnose, sont des méthodes qui ont objectivement prouvé une certaine efficacité dans les douleurs chroniques, notamment par des techniques d’imagerie cérébrale fonctionnelle.
Elles ont maintenant pris une place importante dans les centres antidouleur et permettent même parfois de diminuer les prises médicamenteuses de certains patients.
Comment prévenir la douleur chronique ?
Un traitement efficace de la douleur aiguë représente un élément majeur de la prévention des douleurs chroniques. En effet, la répétition et la multiplication de douleurs en bas âge entraînent des mémorisations de douleur durables qui auront ultérieurement des conséquences dans le ressenti douloureux et le comportement face à une douleur.
Comment vivre avec une douleur chronique ?
Il est bien sûr nécessaire de vérifier qu’il n’y a pas une cause spécifique à traiter.
Il convient ensuite de soulager la douleur et d’ajuster le traitement de la douleur, en recourant aux différentes molécules disponibles et, au besoin, en passant par un centre antidouleur.
Lorsqu’on s’est occupé de la dimension physique de la douleur et qu’elle persiste, on doit s’occuper également de sa dimension psychologique. Car une douleur qui dure a inévitablement des répercussions sur le psychisme (anxiété, dépression…). Le soutien d’un psychiatre ou d’un psychologue, l’utilisation de l’hypnose, la sophrologie, la méditation, la relaxation et l’exercice physique, quand il est possible, ont un impact positif démontré et permettent souvent au malade de ne pas rester passif, ce qui augmente également le ressenti de la douleur.
Il faut également ne pas négliger la douleur sociale : la douleur isole le malade, et l’isolement aggrave le ressenti de la douleur. Il faut donc essayer d’expliquer la douleur à l’entourage afin d’obtenir son soutien actif.
Enfin, il ne faut pas hésiter à réévaluer régulièrement la douleur et les options de traitement. Il existe des progrès médicaux d’une part, et des modifications de la douleur au fil du temps, qui nécessitent des adaptations de la stratégie de traitement.
La douleur chez l’enfant en France
La douleur motive près de deux tiers des consultations médicales et concernerait environ 20 % de la population.
Les liens de la douleur de l’enfant
Le site PEDIADOL
https://www.pediadol.org/
Le site de la douleur de l’enfant UPSA
http://www.institut-upsa-douleur.org/patients/chacun/douleur-enfant
Les liens Pourquoi Docteur
Les bébés éprouvent la douleur comme les adultes
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L'acupuncture soulage les douleurs chez l'enfant
Un logiciel vidéo pour évaluer la douleur de l'enfant
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